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Revue de presse de Mode d'emploi
29 octobre 2012

Chômage : quand les demandeurs d'emploi ne s'inscrivent même plus sur les listes

chomage

 

 

 

 

De plus en plus d'inactifs ne renouvellent pas leur inscription à Pôle Emploi. Crédit Reuters

 Atlantico : Le ministère du Travail a annoncé cette semaine 47 000 chômeurs supplémentaires pour le mois de septembre. Parallèlement à cela, le moral des ménages continue de se dégrader (- 1 point en octobre). Peut-on dire que le marché du travail a perdu le moral en France ?

Jean-Christophe Chanut : Oui c’est le moins que l’on puisse dire, la situation est critique. La perspective de croissance pour 2013 est annoncée à 0,8 (NDLR : prévision d’ailleurs jugée optimiste par les économistes), hors on estime généralement qu’une économie peut commencer à créer de l’emploi à partir d’1,5% de croissance. On peut parler ici d’un climat de morosité qui s’installe peu à peu dans l’Hexagone. Pour répondre à cette situation, le gouvernement en place a certes annoncé les mesures pansements que sont les 150 000 emplois d’avenir et les 500 000 recrutements du contrat de génération, qui devraient à terme atténuer légèrement la course folle du chômage. Ces mesures sont cependant loin d’être une panacée face à la crise, bien qu’elles puissent éviter la dérive totale de l’emploi des jeunes. On peut ainsi dire que la majorité socialiste gagne du temps en attendant des solutions structurelles nécessaires.

Je n’oserais pas pour autant parler de désespoir social, comme cela pourrait être le cas dans la jeunesse grecque ou portugaise, car cela évoque une situation irréversible ou presque. Il y a cependant un espoir déçu vis-à-vis de l’actuelle majorité, selon moi pour une seule raison, c’est que la réalité économique est têtue. La crise de l’euro étant ce qu’elle est, on ne peut espérer une embellie avant 2014, bien que cela dépende aussi énormément de la situation des pays du sud de l’Europe, principalement celle de la Grèce et de l’Espagne.

La hausse des cessations d’inscriptions pour défaut d’actualisation alertent certains économistes, qui estiment qu’une partie de ces décrochages est due aux découragements des chômeurs. S’agit-il d’un effet d’annonce ou d’une réalité sociale ?

Hélas il s’agit bien d’une réalité. Les économistes spécialisés dans le marché du travail dénomment ce phénomène « l’effet de flexion ». Quand la conjoncture s’améliore, ceux qui étaient sortis du marché du travail reviennent car ils reprennent confiance dans l’économie. Voici pour la  définition positive. Par contre, lorsque cet effet joue dans l’autre sens, on observe mécaniquement une hausse des demandeurs d’emplois découragés, tout particulièrement chez les jeunes et les femmes, ces personnes en arrivant à la conclusion qu’il ne sert à rien de renouveler leurs inscriptions à Pôle Emploi étant donné la dureté du contexte économique. L’INSEE avait réussi en 2011 à quantifier ce que l’on appelle le « halo du chômage » (NDLR : la part de non-employés qui n’apparait pas dans les statistiques officielles). L’institut avait ainsi estimé que ce halo était constitué d’à peu près 850 000 personnes qui auraient bien aimé travailler cette année-là.

L’Etat possède-t-il des moyens d’action directe pour tenter de remotiver ces décrocheurs ?

L’interventionnisme est toujours tentant, mais il ne pourrait s’agir que de mesures-rustines sans impact réel. Ces personnes sont souvent sans logement, parfois même incapables de prendre les transports publics tant leur situation financière est critique. Pour revenir aux femmes, très concernées par le sujet, les gardes d’enfants sont aussi un handicap majeur, ces dernières n’ayant souvent plus d’entourage pour les aider. Ces précaires invisibles sont ainsi bien trop éloignés du marché du travail pour être tentés de se réinscrire dans les dossiers de Pôle Emploi. Il n’existe hélas qu’un seul moyen réel pour remotiver ces décrocheurs, et pas le moindre : faire en sorte que la croissance revienne. C’est à cette seule condition que les chômeurs, enregistrés ou non, relèveront la tête.

Quelles mesures, aussi bien politiques qu’économiques, pourraient à terme remonter même partiellement le moral des demandeurs d’emploi ?

Il n’existe pas de panacée pour un problème aussi complexe, il suffit de suivre l’actualité en France et en Europe pour s’en rendre compte. En dehors de la croissance, on évoque le contrat de sécurisation professionnelle que Jean Louis Borloo avait tenté d’introniser : il s’agirait ici de laisser les inactifs conserver leurs statut et leurs salaires (versés par les entreprises et l’assurance chômage) pendant un an. Il y a aussi la fameuse négociation sur le marché du travail que mènent actuellement représentants patronaux et syndicaux. La solution de la flexibilité du travail, inspirée du modèle danois est ainsi très sérieusement discutée (NDLR : la CFDT y serait favorable). Ce principe repose sur un constat simple : les patrons embaucheront plus facilement s’ils sont aussi autorisés à licencier plus facilement, puisqu’ils pourraient ainsi adapter leur force de travail aux fluctuations du calendrier économique. Cette négociation est actuellement en cours, malgré quelques résistances, et sera rendue publique le 31 décembre prochain.

 

Jean-Christophe Chanut

 

 

 

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